vendredi 24 février 2017

La Recherche... par Yves Noël Genod

La Recherche, une étude sur Marcel Proust 
par Yves Noël Genod aux Bouffes du Nord du 21 au 25 février 2017

Enfin devrait on dire, le retour d'Yves-Noël Genod sur les planches. Lui-même, jouant, déclamant, lisant, s'adressant à son public chéri, enfin car, souvent il ne joue pas, il ne joue plus, il fait jouer les autres les méticuleuses déambulations de son inspiration.
Car Yves-Noël est fabuleux lorsqu'il est sur le plateau. D'abord il y a cette voix, singulière et enjôleuse, totalement en adéquation avec son personnage cabotin, elle nous ensorcelle, au delà de sa volonté même parfois, il me semble. Yves-Noël est une diva, un besoin irrépressible de séduire guide le moindre de ses pas à talons ou pas, il ne s'en défendra pas, c'est une question de désir chez tous les comédiens, un manque infini à combler, on ne vous apprend rien. C'est une telle seconde peau que tout son être tend vers la séduction. Mais elle est accompagnée d'une désarmante innocence qui prend le dessus sur la diablerie. Ensuite il y a sa présence, son aura, sa dégaine blond platine affublée d'un costume entre le ringard et le disco, tout ce qu'il y a de moins discret, sa gestuelle gracile et ses oeillades malines, on a envie de le peindre, d'immortaliser l'empreinte qu'il laisse sur nos rétines, pétillante et sensuelle.
C'est avec tout cela qu'il arpente la petite scène des Bouffes, avec une certaine nonchalance, tablette à la main, lisant, parfois marmonnant, parfois courant après les mots, le délice d'extraits de la littérature de Marcel Proust. Le décor est simple, comme une vieille salle d'attente ou un salon désuet, un calme des objets posés là, la lumière en revanche semble totalement sauvage et inapprivoisée. Elle vit sa vie sur le plateau, changeant de manière impromptue l'ambiance à son seul grès.
Ce qui est un enchantement chez Yves-Noël c'est qu'il n'a peur de rien pourrait on penser. La dernière fois que je l'ai vu dans cet exercice, c'était pour nous lire du Shakespeare ; rien de moins. Maintenant c'est Proust et sa Recherche, nous sommes dans la cour des grands et nous allons prendre le temps justement. Le temps comme il dit, lorsqu'entre deux lectures il s'adresse à nous, en professeur de l'instant "manquerait plus qu'en sortant vous disiez : je n'ai pas vu le temps passer !" Aujourd'hui on a plus le temps de rien, à peine celui de se poser deux heures à écouter du Proust, alors les impatients, circulez... C'est donc avec délice que l'on écoute de savoureux passages, lus et parfois commentés, agrémentés, de remarques qui éclairent la lecture. J'avoue que j'en aurais voulu d'avantage de ses exergues, la pertinence et la malice d'Yves-Noël Genod valent bien le détour, en plus de ses anecdotes sur ses rencontres avec Marguerite Duras qui n'ajoutent pas forcément du poids à sa légitimité, les analyses de textes dont il nous livre quelques miettes sont comme une promesse d'intelligence et d'amusement, dont on ne voit qu'une parcelle.
Nous avons passé un moment précieux, nous ne pouvons en ressortir qu'en ayant envie de relire Proust pour faire durer encore le plaisir d'une littérature dont les mots tentent et parfois y parviennent, à décrire avec perfection l'infini de la palette des émotions humaines. J'espère que ce succès donnera envie à Monsieur Genod de continuer à nous donner parfois ces rendez-vous particuliers, entre nous, une oeuvre et sa transcendance.


Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire